L’employeur qui manque à son obligation d’adaptation du poste du salarié méconnaît son obligation de sécurité.
Arrêt de la Cour d’Appel de Douai du 30 novembre 2018
Une salariée s’est vu confier les missions en principe à la charge d’une collègue partie en congé maternité.
Elle est placée en arrêt maladie suite à la dégradation des conditions de travail. Son contrat est rompu pour inaptitude.
Le Conseil des prud’hommes juge bien fondé le licenciement.
La salariée forme appel de cette décision. Elle soutient que l’employeur a manqué à son devoir prévention du harcèlement moral sur le fondement de l’article L1152-4 du CT.
Ce dernier dispose en effet que « l’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral ».
Le harcèlement moral découlant de ses conditions de travail, d’une surcharge de travail non rémunérée et d’un avertissement injustifié. Son état de santé s’en étant trouvé fortement dégradé.
Le raisonnement de la Cour d’Appel
La Cour rappelle que le harcèlement moral et le manquement à l’obligation de sécurité peuvent résulter des méthodes de gestion de l’employeur ou d’un supérieur hiérarchique
Conformément à la jurisprudence « Air France », la Cour rappelle également que l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention propres à faire cesser une situation de harcèlement dont il aurait eu connaissance respecte son obligation légale de sécurité.
L’entreprise qui ne justifie pas avoir mis en œuvre ces mesures de prévention -notamment l’adaptation du travail à l’homme – viole son obligation de sécurité.
Le licenciement pour inaptitude qui en a découlé est jugé sans cause réelle et sérieuse.
La Cour énonce ainsi que l’obligation de sécurité de l’employeur implique tant l’adaptation du poste de travail que la prise en compte du changement de circonstances.
Obligation de sécurité et adaptation du poste
L’obligation d’adapter le poste
Selon l’alinéa 4° de l’article L4121-2 du Code du travail :
“L’employeur met en oeuvre les mesures prévues à l’article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants: (…).
4° Adapter le travail à l’homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la sant
L’employeur doit donc d’aménager le poste en fonction de l’homme et de ses capacités physiques et mentales.
Tenir compte des facteurs individuels sans discriminer
L’application du principe du principe d’adaptation suppose la prise en compte des facteurs individuels que sont l’âge, le sexe, l’état de santé, notamment, mais sans en faire des critères de sélection.
Autrement dit, les facteurs individuels ne doivent pas être discriminants. L’employeur doit les prendre en compte pour adapter les différents paramètres du poste.
À situation nouvelle, nouvelle adaptation du poste
Aux termes de l’alinéa 4 de l’article L4121-1 du Code du travail « l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ».
Il s’agit d’actions de prévention d’information, de formation et de moyens adaptés aux changements.
C’est ce dernier point que la CA met en évidence. La survenance d’un changement de circonstances (arrêt de travail prématuré d’une salariée enceinte).
Ainsi, l’employeur qui a transféré la charge des missions de sa collègue à la salariée sans en mesurer l’effet sur les conditions de travail et sa santé a violé l’obligation d’adaptation du poste.
Il a donc violé son obligation de sécurité.
